Le travail fut le grand absent du débat sur les retraites, alors que le désir de travailler autrement était au coeur du refus de cette réforme. Si le travail reste une dimension essentielle de la vie sociale, ses réalités se sont diversifiées et fragmentées au point qu'on ne sait plus en débattre. Trop souvent rabattu sur la notion d'emploi, il est pourtant traversé de clivages et d'aspirations, que ce dossier coordonné par Anne Dujin veut contribuer à expliciter. À lire aussi dans ce numéro : Crise écologique : inutile de se soulever ? ; Le prix des migrants ; Est-il impossible d'être un intellectuel juif ? ; Constantin Sigov et la dignité humaine ; Droits et devoirs dans l'ordre républicain ; L'heure de Cristina Campo.
En France, l'université publique souffre d'un manque de moyens et d'une absence de reconnaissance politique. À rebours des logiques d'évaluation et de marchandisation, ce dossier, coordonné par Matthieu Febvre-Issaly, défend l'idéal d'une université placée au centre de la production et de la transmission des savoirs, au fondement de la culture démocratique. À lire aussi dans ce numéro?: Une nouvelle civilité sexuelle?; Liberté et droit au suicide?; La victoire d'Erdogan?; La France de Vichy et l'Allemagne nazie?: états d'âme?; Entretien avec Pierre Michon?; Le dernier livre d'Yves Bonnefoy.
La pandémie de Covid-19 a placé la santé publique au coeur de nos sociétés en révélant une immense vulnérabilité collective, mais celle-ci peine encore à se constituer en objet de débat public. Pourtant, les défis posés au système de santé, comme l'inégalité d'accès aux soins, la prévention, les conditions de travail des soignants, le réchauffement climatique ou le numérique, relèvent de choix collectifs. Ce dossier, coordonné par Yann Bubien et Anne Dujin, propose une approche globale et politique de la santé publique pour le xxie siècle. À lire aussi dans ce numéro : La renaissance du moralisme américain ; Dans le miroir de Boutcha ; La Syrie martyrisée ; Idées reçues sur l'immigration ; Nouveaux fragments d'une mémoire infinie.
Le retour de l'instabilité des marchés a réveillé le spectre de la crise financière de 2008, et ravivé le questionnement sur l'efficacité de la régulation. Mais si les crises se suivent, elles ne se ressemblent pas. L'actuelle, marquée par une forte inflation, témoigne non pas d'une déconnexion entre la finance et l'économie réelle, mais au contraire de leur profonde intrication. Ce dossier interroge la reconfiguration des rapports entre capitalisme financier et démocratie, à l'heure où pour l'un comme pour l'autre, tout est affaire de confiance.
4 mois après la mort de Mahsa Amini et le début de la révolution en cours en Iran, une expertise académique semble plus que jamais nécessaire.
En croisant les perspectives de la philosophie politique et morale, l'économie-politique, la sociologie, l'histoire, la culture, l'art et le cinéma iranien, ce dossier donnera à lire différentes interprétations de la tragédie iranienne.
Les dialogues apporteront le déchiffrage de cette révolution, ses racines, ses actualités, sa brutalité et sa violence. Laissons les problématiques posées par les chercheurs nous aider à resituer le contexte politique de la révolution « Femme, Vie, Liberté ».
Avec des textes d'Olivier Abel, Hamit Bozarslan, Farad Kosrokavar et Marie Ladier-Fouladi.
La guerre en Ukraine entre dans sa deuxième année. Pourtant, demeure l'inquiétante tentation de la tenir à distance, comme si les « vraies » guerres, celles qui engagent autant les régimes politiques que les sociétés, appartenaient seulement au passé. L'ambition de ce dossier, coordonné par Hamit Bozarslan et Anne-Lorraine Bujon, est à la fois d'interroger la nature et les formes précises de ce conflit, de l'affrontement interétatique classique à la guerre hybride, économique et technologique, et de rappeler que la cité démocratique doit se saisir et débattre de l'enjeu de la guerre, qui la concerne au premier chef. À lire aussi dans ce numéro : nos mythologies laïques, le récit de soi avec Ricoeur, Pérou : l'hiver et le massacre, lire Mario Vargas Llosa, la révolution taoïste, et les derniers historiens païens.
«?Être moderne?» a longtemps désigné une promesse de progrès, de liberté et de justice. Aujourd'hui le réchauffement climatique, une crise économique sans fin, la défiance à l'égard de la technique ou les excès de l'individualisme manifestent au contraire un doute sur la supériorité de notre présent sur le passé. Sommes-nous donc condamnés à être antimodernes?? Ce dossier, coordonné par Michaël Foessel et Jonathan Chalier, se penche sur l'héritage de la modernité, dont le testament reste ouvert et à écrire. À lire aussi dans ce numéro?: La démocratie dans le miroir russe, le métier diplomatique en danger, la solidarité énergétique à l'épreuve de l'hiver et la littérature par en-dessous d'Annie Ernaux.
Le XXe Congrès du PCC, qui s'est tenu en octobre 2022, a confirmé le caractère totalitaire de la Chine de Xi Jinping. Donnant à voir le pouvoir sans partage de son dictateur, l'omniprésence et l'omnipotence d'un parti désormais unifié et la persistance de ses ambitions globales, il marque l'entrée dans une période d'hubris et de crispation où les ressorts de l'adaptation du régime, jusque-là garants de sa pérennité, sont remis en cause. On observe un décalage croissant entre l'ambition de toute-puissance, les concepts-clés du régime et le pays réel, en proie au ralentissement économique. Le dossier de novembre, coordonné par la politologue Chloé Froissart, pointe ces contradictions : en apparence, le Parti n'a jamais été aussi puissant et sûr de lui-même, mais en coulisse, il se trouve menacé d'atrophie par le manque de remontée de l'information, la demande de loyauté inconditionnelle des cadres, et par l'obsession de Xi d'éradiquer plutôt que de fédérer les différents courants en son sein. Des failles qui risquent de le rendre d'autant plus belliqueux à l'égard de Taiwan. À lire aussi dans ce numéro : Le droit comme oeuvre d'art ; Iran : Femme, vie, liberté ; Entre naissance et mort, la vie en passage ; En traduisant Biagio Marin ; et Esprit au Portugal.
La crise sanitaire a amplifié et accéléré diverses tendances qui lui préexistaient : vulnérabilité et pauvreté de la population, violence de la dématérialisation numérique, usure des travailleurs sociaux et remise en cause des mécanismes de solidarité. Dans ce contexte, que peut encore faire le travail social ? Peut-il encore remplir une mission d'émancipation ? Peut-il s'inspirer de l'éthique du care ? Le dossier, coordonné par Fabienne Brugère et Guillaume Le Blanc, mène l'enquête auprès des travailleuses et travailleurs sociaux. À lire aussi dans ce numéro : le procès des attentats du 13-Novembre, les nations et l'Europe, l'extrême droite au centre, l'utopie Joyce et Pasolini, le mythe à taille humaine.
L'invasion de l'Ukraine en février 2022 a constitué un choc immense pour l'Europe et le monde. Elle s'inscrit néanmoins dans une forme de continuité, qui a vu le régime de Poutine se faire toujours plus répressif à l'intérieur de ses frontières, et menaçant à l'extérieur, depuis au moins 2008 et l'affrontement militaire en Géorgie, l'annexion de la Crimée en 2014 marquant une nouvelle étape dans cette escalade. Constitué en urgence en réaction au déclenchement de la guerre, le dossier de ce numéro interroge ses premières conséquences. De quelles manières les sociétés ukrainienne et russe font-elles face à la guerre?? Comment résister à la vaste opération de révisionnisme historique engagée par le régime de Poutine, dont témoigne la répression de toutes les sources indépendantes d'information, mais aussi de recherche et de connaissance?? En Ukraine, sur quelles ressources la résistance peut-elle compter?? En Russie, une opposition parviendra-t-elle à se constituer, malgré la chape de plomb qui s'est abattue sur le pays?? À lire aussi dans ce numéro?: la justice entre les générations, le fascisme du dedans, la politique de Lévi-Strauss, la médecine contre les robots, une autre histoire de la racialisation et la naissance de l'écoféminisme.
Le terme de « médias » est devenu un vortex, qui semble unifier des réalités et des formes bien différentes, sinon hétérogènes. Entre les médias traditionnels d'information, pris dans une spirale de polémiques, et les plateformes socionumériques qui se présentent comme de modernes salles de rédaction en libre accès, il est plus que jamais nécessaire d'établir des distinctions. Comment comprendre que, sur un même fil d'actualité, se côtoient des discours jusqu'ici clairement séparés, qui diluent l'ancienne division entre information et divertissement dans la catégorie problématique des « contenus » ? Que dire des mutations qui amènent à revoir les frontières entre actualité et connaissance, et font apparaître de nouvelles figures, aux marges du territoire médiatique traditionnel (Youtubers, streamers, etc.) ? L'ambition de ce dossier, coordonné par Jean-Maxence Granier et Éric Bertin, est d'interroger le médiatique contemporain dans ses mutations et de le « déplier » afin de mieux saisir ses formes, ses transformations et de repenser ses enjeux. Avec des textes de Claire Sécail, Jean-Louis Missika, et Dominique Cardon.
Les « communs », dans leur dimension théorique et pratique, sont devenus une notion incontournable pour concevoir des alternatives à l'exclusion propriétaire et étatique. Opposés à la privatisation de certaines ressources considérées comme collectives, ceux qui défendent leur emploi ne se positionnent pas pour autant en faveur d'un retour à la propriété publique, mais proposent de repenser la notion d'intérêt général sous l'angle de l'autogouvernement et de la coopération. Ce faisant, ils espèrent dépasser certaines apories relatives à la logique propriétaire (définie non plus comme le droit absolu d'une personne sur une chose, mais comme un faisceau de droits), et concevoir des formes de démocratisation de l'économie. Le dossier de ce numéro, coordonné par Édouard Jourdain, tâchera de montrer qu'une approche par les communs de la démocratie serait susceptible d'en renouveler à la fois la théorie et la pratique, en dépassant les clivages traditionnels du public et du privé, ou de l'État et de la société.
La pandémie a été l'occasion de rééprouver la dimension incarnée de nos existences. L'expérience de la maladie, la perte des liens sensibles et des repères spatio-temporels, le questionnement sur les vaccins, ont redonné son importance à notre corporéité. Ce « retour au corps » est venu amplifier un mouvement plus ancien mais rarement interrogé : l'importance croissante du corps dans la manière dont nous nous rapportons à nous-mêmes comme sujets. Qu'il s'agisse du corps « militant » des végans ou des féministes, du corps « abusé » des victimes de viol ou d'inceste qui accèdent aujourd'hui à la parole, ou du corps « choisi » dont les évolutions en matière de bioéthique nous permettent de disposer selon des modalités profondément renouvelées, ce dossier, coordonné par Anne Dujin, explore les différentes manières dont le corps est investi aujourd'hui comme préoccupation et support d'une expression politique. À lire aussi dans ce numéro : « La guerre en Ukraine, une nouvelle crise nucléaire ? », « La construction de la forteresse Russie », « L'Ukraine, sa résistance par la démocratie », « La maladie du monde », et « La poétique des reliques de Michel Deguy ».
Depuis la vague de déboulonnage des statues qui a suivi l'assassinat de George Floyd, en mai 2020, la mémoire et le patrimoine sont redevenus, de manière toujours plus évidente, des terrains de contestation politique. Inscrire ces appropriations de l'espace urbain dans un contexte élargi permet d'en comprendre plus précisément la portée : des manifestations moins médiatisées, comme l'arrachement de la statue d'un empereur éthiopien en Grande-Bretagne, ou touchant à des strates d'histoire inattendues, comme la gestion de la statuaire soviétique, participent d'une même volonté de contester un ordre en dégradant ses symboles. Alors qu'une immense statue célébrant l'amitié russo-ukrainienne vient d'être démontée à Kiev, le dossier de ce numéro, coordonné par Anne Lafont, choisit de prendre au sérieux cette nouvelle forme de contestation, et montre que les rapports souvent passionnés que les sociétés entretiennent avec leur patrimoine n'est jamais sans lien avec leur expérience du conflit. À lire aussi dans ce numéro : l'histoire, oubli de l'inconscient ?, le prix de l'ordre, pour une histoire européenne, les femmes dans l'Église, les réfugiés d'Ukraine et nos mélancolies secrètes.
Des exilés plongés dans des limbes, contraints de risquer leur vie, une absence de solidarité entre les États, la multiplication des camps, le rétablissement des contrôles aux frontières?: autant d'échecs du système européen de l'asile. Face à cette crise, le dossier coordonné par Pierre Auriel refuse à la fois la déploration et le cynisme. Il suggère de composer avec la peur des migrations pour une politique plus respectueuse des droits des exilés. À lire aussi dans ce numéro?: l'obligation d'insertion, Michon marxiste ?, ce que Latour fait à la philosophie, la fin des libertés en Russie, et l'actualité de Georges Perec.
Les difficultés rencontrées pendant la gestion de l'épidémie de Covid-19 ont remis en lumière le rapport paradoxal que la France entretient avec son État. Parce qu'il est censé décider de tout, il est le recours vers lequel tous se tournent en situation de crise, en même temps qu'il concentre l'essentiel des critiques. Au-delà de la crise sanitaire, la question d'un juste partage des responsabilités entre l'État et d'autres acteurs - les collectivités territoriales, les citoyens, les syndicats ou les entreprises- pour construire un horizon d'action commun se pose. Alors même que la pandémie marque le retour en grâce de l'action publique, comment changer concrètement la figure de l'État pour apaiser sa relation avec la société et lui permettre de répondre aux aspirations contemporaines en matière d'écologie et de justice sociale ? C'est à cette question que s'attache ce dossier, coordonné par Lucile Schmid.
Selon ce dossier coordonné par Carole Desbarats et Emmanuel Laurentin, les institutions culturelles sont confrontées depuis quelques temps à des enjeux que l'épidémie de coronavirus a rendus plus aigus encore. Alors même que le confinement a suscité une forte demande de culture, beaucoup de ces institutions sont aujourd'hui face à un tournant. À lire aussi dans ce numéro : Trump contre l'Amérique, des élections par temps de pandémie et des jeunes sans bercail.
On oppose souvent science et croyance, comme si ces deux régimes de discours n'avaient rien de commun. Pourtant, l'expérience nous apprend que c'est généralement quand l'un des deux fait défaut que l'autre subit une crise. Dans le contexte pandémique actuel, l'incapacité des experts et des gouvernants à rendre compte dans l'espace public des conditions selon lesquelles s'élaborent les vérités scientifiques, aussi bien qu'à reconnaître la part de ce que nous ne savions pas, a fini par rendre suspecte toute parole d'autorité et par faciliter la circulation et l'adhésion aux théories les plus fumeuses. Comment s'articulent aujourd'hui les registres de la science et de la croyance ? C'est à cette question que s'attache le présent dossier, coordonné par le philosophe Camille Riquier, avec les contributions de Jean-Claude Eslin, Michaël Foessel, Bernard Perret, Jean-Louis Schlegel, Isabelle Stengers. À lire aussi dans ce numéro : l'avenir de l'Irak, les monopoles numériques, les enseignants et la laïcité, et l'écocritique.